Cet article correspond à la version écrite de la chronique audio
enregistrée pour notre podcast du mois "Le commercial c'est pas si mal".
A l'occasion de ce mois placé sous le signe du
commercial, du rentable, du papa Noël et de coca-cola j'avais, pour ma part, envie
de creuser un peu le côté superficiel voire
putassier que ce genre de thème - et donc de musique - peut suggérer.
J'ai donc décidé de gratter un peu la surface pour me concentrer sur l’un des aspects que je
trouve intéressent à creuser et qui découle directement de ce
thème « commercial », à savoir la culture, et la musique
populaire au sens très noble du terme.
Actuellement, il est vrai que ce terme est un peu dévoyé, ou du moins galvaudé. Une sorte de confusion se crée entre la
culture de masse et la culture populaire, alors que ce
sont deux choses complètement différentes et qui, surtout, n'ont
pas le même but.
Là où la culture de masse vise avant tout à la
rentabilité, créant ainsi une musique qui n’est alors qu’un pur
produit de consommation vide et annihilant, la musique populaire
c'est, certes la musique qui commercialement parlant a du succès
auprès du plus grand nombre, mais on ne peut pas la réduire qu’à
ça : la musique populaire c’est aussi et
surtout un espèce de « marqueur temporel », parfois
symbole d’une époque, d’une génération, d’une philosophie
même. Ce n'est donc pas pour rien que la culture pop prend racine, entre
autre, dans les mouvements contestataires des années 50 et 60. C’est un
objet social et culturel constitutif de ce qu’on appelle la
« mémoire collective », et en ce sens, la musique pop
peut atteindre une dimension complètement iconique. Et ce n'est certainement pas en cette période particulièrement funeste où toutes les plus grandes pop stars de la planète nous quittent les unes après les autres que vous me contredirez.
La musique populaire c'est aussi bien souvent une
porte d'entrée pour les jeunes mélomanes vers des contrées
musicales peut-être plus alternatives et moins mise en avant par les
médias dominants. Cette première rencontre peut être décisive
quant à l’affirmation des goûts pendant l’adolescence et c’est
aussi pour ça qu’on peut avoir un attachement et une tendresse
particulière vis-à-vis de certains groupes. Pour moi, un bon groupe
de musique populaire, c’est aussi un groupe qui est empreint de la charge
personnelle et intime qu’on veut bien lui accorder.
En ce sens, un groupe comme Depeche Mode a pour moi cette valeur unique et sensible. Il a été, à l'aube de mes 12 piges, le premier groupe qui m'a donné cet avant-goût de new wave vaguement indus qui, par la suite, devait devenir l'une de mes plus grandes obsessions musicales. Aujourd'hui, je reste intimement convaincue que si mon brave papounet n'avait pas eu le bon goût de m'offrir un best-of de Depeche Mode pour mon anniversaire, eh bien peut-être que je n'aurai jamais été sensible à ce type de musique. Who knows... ?
Shake The Disease - The Singles 01-85 (1985)
En ce sens, un groupe comme Depeche Mode a pour moi cette valeur unique et sensible. Il a été, à l'aube de mes 12 piges, le premier groupe qui m'a donné cet avant-goût de new wave vaguement indus qui, par la suite, devait devenir l'une de mes plus grandes obsessions musicales. Aujourd'hui, je reste intimement convaincue que si mon brave papounet n'avait pas eu le bon goût de m'offrir un best-of de Depeche Mode pour mon anniversaire, eh bien peut-être que je n'aurai jamais été sensible à ce type de musique. Who knows... ?
Never Let Me Down Again - Music For The Masses (1987)
Depeche Mode, groupe britannique formé en 1979, fut fondé par
Dave Gahan, Martin L. Gore, Andrew Fletcher, Alan Wilder et
Vince Clarke. Bon... Clarke n’a pas fait long feu au sein du groupe
puisqu’il n’est présent que sur le premier album, Speak &
Spell, album qu’il a presque entièrement composé, avant de
prendre le large et de partir fonder Yazoo, laissant de fait le p'tit blondinet Martin L. Gore principal compositeur du groupe. Sage décision, Vince !
Très rapidement, Depeche Mode va être repéré par
Daniel Miller, grand monsieur de la musique, immense producteur et découvreur de talent et, accessoirement, fondateur du
tout jeune label Mute Records. En tant qu'amatrice d'indus et de post-punk, je me voyais mal ne pas vous faire un bref topo sur Mute Records, qui, sous bien des aspects, est intimement lié à l'histoire et à la carrière de Depeche Mode. Cet excellent label, rapidement devenu culte, a beaucoup contribué à faire vivre une certaine musique des années
80, typée indus et post-punk donc et plutôt tourné
vers l'underground et l'expérimentation. Si vous avez épuisé votre interminable liste des "groupes à écouter", foncez vous plonger dans le catalogue ultra
riche de Mute Records : le dandy punk Nick Cave et ses mauvaises graines, l'énigmatique Frank Tovey de Fad Gadget, les très politiquement incorrects slovènes de Laibach, la déesse gothique Diamanda Galas, les très influents londoniens de Wire, les orbites barrés des Residents et même Throbbing
Gristle, maîtres incontestés de l'indus, sont passés par Mute qui, décidément, s'impose comme l'un des labels les plus novateurs de sa génération
Warm Leatherette - T.V.O.D (1978)
On attribue souvent ce morceau à Grace Jones mais en réalité il fut composé par The Normal, le projet musical de Daniel Miller.
Étant fan de Depeche Mode depuis un bon
moment, j'ai toujours été frappée par l'image que ce font
certaines personnes du groupe. C'est ce que j'appelle le syndrome
“Just Can't Get Enough”, c'est à dire que beaucoup vont réduire
le groupe à ce morceau, à ce premier succès qui est sans doute le
pire du groupe, en occultant de fait 99% de la carrière du groupe et en réduisant le groupe à une image new wave ultra
kitchouille. Certains on tendance à associer Depeche Mode à
certains groupes comme Duran Duran... Et encore, c'est loin d'être les pires ! Yazoo justement, Kajagoogoo (désolée du
gros mot) sont des groupes qui, certes nous font bien marrer
quand on ne sait pas quoi regarder sur Youtube, mais qui ne sont
incontestablement pas de la même trempe que Depeche Mode.
Contrairement à tout ces groupes ultra calibrés, Depeche Mode est un groupe qui a une aura très particulière. Tout en restant résolument pop et dansante, la musique très épurée de Depeche Mode va rapidement brasser toute une flopée d'influences plus underground, notamment des sonorités plus indus, résultat des errances nocturnes de Martin L. Gore dans certains clubs berlinois plutôt underground.
Master And Servant - Some Great Reward (1984)
Avec Violator, sorti en 1990, Depeche Mode signe son plus grand succès. Vendu à plus de 10 millions d'exemplaires, c'est aussi souvent l'album que les gens préfèrent, salué par la critique, il est, pour beaucoup, LE chef d’œuvre inégalable de Depeche Mode, l'album de tous les tubes et de toutes les reprises.
Personal Jesus - Violator (1990)
Contrairement à tout ces groupes ultra calibrés, Depeche Mode est un groupe qui a une aura très particulière. Tout en restant résolument pop et dansante, la musique très épurée de Depeche Mode va rapidement brasser toute une flopée d'influences plus underground, notamment des sonorités plus indus, résultat des errances nocturnes de Martin L. Gore dans certains clubs berlinois plutôt underground.
Stripped - Black Celebration (1986)
Avec Violator, sorti en 1990, Depeche Mode signe son plus grand succès. Vendu à plus de 10 millions d'exemplaires, c'est aussi souvent l'album que les gens préfèrent, salué par la critique, il est, pour beaucoup, LE chef d’œuvre inégalable de Depeche Mode, l'album de tous les tubes et de toutes les reprises.
Policy Of Truth - Violator (1990)
Mais si il y a un tube à retenir de Violator, c'est évidemment Enjoy The Silence,
l'hymne incontournable, le carton absolu, que dis-je icônique de
Depeche Mode. Et c'est en l'écoutant que l'on se rend compte que le temps est sans
doute le meilleur test qui soit : un morceau comme "Enjoy The Silence" est increvable, indémodable, intemporel, et je pense sincèrement que
dans dix, vingt, trente ans à venir ou plus, ça marchera encore tant le morceau est
beau et touchant dans sa simplicité. Pour moi "Enjoy The Silence" symbolise parfaitement tout le talent de Depeche Mode : on ne peut pas
dire que les musiciens qui composent le groupe soient des monstres de technicité,
mais par contre, ils ont ce que certains très bons techniciens n'ont
pas, c'est-à-dire un sens aigu de la mélodie. Et en ce sens,
il faut rendre hommage à Martin L. Gore qui a toujours su
faire tenir des mélodies ultra efficaces et fédératrices tout en
étant très chiadées sur seulement quelques notes de guitare ou de
synthé.
Enjoy The Silence - Violator (1990)
Pour conclure cette chronique, je ne peux que vous encourager vivement à découvrir sans a priori ni idée préconçue la discographie de Depeche Mode et notamment les albums Songs Of Faith And Devotion et Ultra, tous deux sortis dans les années 90, une période où le groupe était beaucoup moins mis en avant médiatiquement parlant. De par l’élégance des compositions, la richesse du son et le brassage d'influences assez phénoménal, ces deux albums incroyablement aboutis m'évoquent complètement certains opus de Peter Gabriel et de David Bowie période 90's.
Barrel Of A Gun - Ultra (1997)
Plongez-vous également dans les clips de Depeche
Mode dont beaucoup ont été réalisés par l'éminent Anton Corbijn et dont certains sont de véritables bijoux esthétiques. C'est un
groupe qui a toujours su développer une identité visuelle
extrêmement forte et percutante, mais n'est ce pas là l'apanage des grands groupes de pop ?
Depeche Mode, c'est aussi un groupe qui a la
particularité non négligeable de compter dans ses rangs l'un des
meilleurs, l'un des plus incroyables chanteurs qu'il m'a été donné
d'entendre : Dave Gahan, chanteur exceptionnel au charisme ultra
magnétique et au timbre immédiatement reconnaissable.
Actuellement, Depeche Mode sort encore d'excellents
albums, c'est un groupe qui, malgré son impressionnante longévité a
toujours des choses à dire, et qui en live est toujours d'une immense
générosité et sincérité envers son public.