mercredi 15 octobre 2014

Eros: Talons compensés, poings américains et soleil brûlant



Eros, c'est l'occasion d'aborder le sexe bien sûr,  mais surtout sa représentation dans les médias et dans la musique.
États-Unis,  années 90. Le hip hop s'installe comme musique mass-média avec ses codes, aussi bien musicaux que stylistiques, qui évolueront jusqu'à devenir culture dominante dans nos années 2010.
Un milieu de mecs, fait par les mecs, pour les mecs. For us by us. Au programme: testostérone qui se mesure en billets verts et signes de richesse extérieurs à faire passer pour un plouc Elvis et son Graceland.
Au milieu de cette démonstration masculine, les filles se font petit à petit une place. Tout d'abord avec Lil Kim, petite protégée de Notorious B.I.G., qui appose avec un certain manque de finesse les codes masculins du rap et ses références sexuelles d'un point de vue féminin. Fière de sa promotion canapé incrusté de diamants, Lil Kim se pose comme objet sexuel jusqu'à se mettre en scène telle une real doll dans son clip "How Many Licks".


Bien que manquant d'un second degré salutaire, Lil Kim a ouvert la voie à de nombreuses femmes dans le rap. Que ce soient en tant qu’interprètes, productrices (on peut par exemple penser à Aaliyah en termes de poids dans les ventes et d'influence à Missy Elliot).
Nous nous attardons ici sur la représentation du sexe dans le rap. Qu'à un moment donné les filles l'ont joué mauvaises filles à parler aussi ouvertement de sexe et de plaisir sexuel.
Aujourd'hui, de nombreuses artistes se sont approprié les codes visuels macho et sexuellement centrés du hip-hop en général.
Brooke Candy fait partie de ces artistes protéiformes qui peuvent faire parler d'elles pour de mauvaises raisons. En manipulant l'esthétique de tout un genre de culture populaire, on peut y laisser des plumes.
Fille d'un big boss de chez Penthouse, Brooke Candy a démarré sa carrière dans le strip-tease, ce qui selon elle lui a permis d'analyser en temps réel les rapports entre les genres et surtout la notion de pouvoir qui découle de tout ce qui touche de près ou de loin au sexe. Foutue à la porte par des parents au final pas si progressistes que ça,  elle persévère, vit dans sa voiture et écrit. Elle se fera connaître via un featuring avec Grimes qui oscille entre le lavage de mirettes pour le hipster-geek moyen et le mauvais trip de LSD liquide.


Au delà de ce clip aujourd'hui très swag et qui a fait connaître à la sphère internet son look entre Cammy de Streetfighter et une héroïne sous acides d'Anime, Brooke distille aujourd'hui un hip hop acéré qui analyse par des biais visuels l'esthétique sexiste et écœurante de fric de la scène hip hop. On a la nausée et c'est exactement ce qu'elle recherche.


Pour finir sur ce rapide tour d'horizon, je ne peux que vous conseiller d'attarder une oreille sur le hip-hop sale, crasseux aussi bien musicalement que visuellement des deux tourtereaux de Die Antwoord.
Faisant sortir d'une esthétique au final très léchée aussi bien des réflexions sexuelles et sociales, Die Antwoord est une sorte de hip-hop qui aurait été le rejeton maudit et élevé dans la cave du hip hop bling-bling. Mention spéciale à Yo Landi qui sait appuyer là où ça fait mal et où ça fait aussi bizarrement un peu de bien.