vendredi 28 août 2015

Le Cabinet du Docteur Slapstick : (Re)mix my Childhood


Cet article est un complément de l’émission Soundtracks Of Our Lives II.

L’enfance étant une période où les émotions sont vécues intensément, les premières musiques entendues au cours de notre vie occupent une place toute particulière dans nos cœurs. Parce qu’elles constituent le fondement même de notre rapport à la chose musicale, qu’on les renie ou qu’on les chérisse, les bandes-son de notre enfance font partie de nous qu’on le veuille ou non. Même si avec le recul nous choisissons de reconnaître et de rire de cette naïveté que nous pouvions avoir vis-à-vis de la qualité de tel ou tel morceau, même si la maturité nous a amené à passer à autre chose, il n’en demeure pas moins que l’enfant en nous peut continuer de réagir – ne serait-ce qu’un chouïa – à l’écoute de ce qui fut notre environnement musical, avec ces mélodies entêtantes, ses paroles galvanisantes et ces arrangements pouvant aller du classieux au plus putassier.

Oui, nous allons parler des musiques de dessins animés.

Et malgré le dédain que pourrait recueillir ce pan de la culture musicale de la part des instances critiques, le domaine a ses propres codes ainsi que ses artistes qui les font mais – plus intéressant encore  – qui les défont. Il s’agira donc de se pencher sur la musique de dessin animé non pas en tant que création mais en tant que support à la création. Non pas de simples reprises mais du sample, du remix, du mashup ou de la parodie, autant d’exercices où les artistes se réapproprient la musique de nos films et séries animés favoris à divers degrés pour en tirer une lecture déviante, une nouvelle œuvre qui titille la fibre nostalgique dans ce mélange de familiarité et d’étrangeté qui peut effrayer, fasciner ou même sublimer toute l’affection que l’on peut porter aux morceaux originaux.

Et ça, même les marchands de soupe l’avaient compris.


Ne me remerciez pas, j’adore faire plaisir.

L'approche la plus basique est celle de la citation au détour d'un morceau, apportant généralement une touche décalée de par son apparition aussi soudaine qu’inattendue.


Bon, là c’est facile, le clip vous file direct la référence.


Là, si vous trouvez, sachez que je vous aime. Vraiment.

Vient ensuite le sample qui, repris en boucle, compose la structure du morceau, lequel vient lui redonner une nouvelle dimension par la rythmique d’un point de vue instrumental (ajout d’un beat) ou vocal (du rap), ou les deux.


Oh là là, mais de quelle BO de film peut-il bien s’agir ?

Plus loin encore, la déstructuration vise à faire du morceau une matière sonore triturée, assimilée et déglutie, mise au même niveau que les autres éléments.


Un peu de cartoon passé au broyeur…


Même si ce n’est pas officiel, saurez-vous déceler quelques bribes du générique de Chapi-Chapo dans ce morceau ?

À un niveau moins extrême et plus ludique se trouve le mashup dont l’art repose sur la rencontre plus ou moins incongrue d’univers musicaux dans un ensemble cohérent. Sa forme la plus classique est la version instrumentale d’un morceau couplée avec la version a capella d’un autre. Imaginez un seul instant l’album Demon Days de Gorillaz en version condensée… avec les paroles des chansons de My Little Pony : Friendship is Magic. Sachez que quelqu’un l’a fait.


Et le pire, c’est que ça marche !

Mais certains vont plus loin dans la sophistication en travaillant directement le matériau de l’intérieur. Il s’agit de hacher le morceau d’origine, d’agencer ces bribes et d’en modifier les tons en une nouvelle interprétation. À cela sont rajoutés des éléments extérieurs qui se doivent d’être tout aussi identifiables et, si besoin, une rythmique électro. Le compositeur australien Nick Bertke s’est même spécialisé dans l’exercice et s’est notamment fait connaître pour ses relectures de Disney où les voix deviennent le principal instrument.


Le premier, celui qui l’a fait connaître…


Plus complexe déjà…


Et un trio féminin pour clore en beauté.

Pour le reste, foncez sur sa chaîne YouTube, ça vaut le coup !

D’ailleurs, rien n’oblige à partir uniquement des chansons, la seule bande-son peut suffire.


Un exemple de la musicalité que peuvent avoir de simples dialogues.

De même, on peut utiliser ce matériau pour reconstituer un autre morceau sans aucun rapport avec la source, histoire de multiplier les possibilités.


Ai-je besoin d’en dire plus ?

Puisque nous parlons de réinterprétation, nous pouvons maintenant entrer dans le domaine fort large de la parodie dont les innombrables angles d’attaque permettent toutes les folies dans l’hommage et/ou la destruction de notre enfance à un niveau plus ou moins violent.


À vos risques et périls. N’oubliez pas d’activer les sous-titres pour celui-ci.

À ce stade, les vannes sont ouvertes et les modèles peuvent être transcendés à souhait, ne laissant plus que leur substantifique moelle exploitée dans ce mélange de moquerie et de tendresse.


Best Love Story Ever.

Alors, à tous les sceptiques, je vous le dis : ne vous arrêtez pas à la mièvrerie apparente. Elle peut receler de nombreux trésors.